• Ce roman très documenté traite d’un épisode peu connu de la Seconde Guerre Mondiale : la formation à la résistance par les services secrets britanniques de jeunes Français passés en Grande Bretagne et leur action ultérieure dans la France occupée. Parmi ceux-ci, trente neuf femmes se sont engagées.

    Simon Mawer fait suivre au lecteur l’itinéraire de l’une de ces femmes, Marian Sutro, née dans une famille franco-britannique et élevée à Genève, ce qui l’a rendue parfaitement bilingue en anglais et français.

    L’accueil de ces jeunes gens, qui ont déjà dû traverser la Manche, est effectué à Londres, avant leur transfert en Ecosse où ils suivent une formation militaire poussée : endurance physique, maniement des armes, appréhension du risque, capacité à vivre incognito dans un pays où les résistants sont traqués.

    Au terme de cette formation qui nécessite déjà des nerfs d’acier et une excellente condition physique, la jeune héroïne, lors de son retour à Londres, rencontre encore son frère, physicien de haut niveau, qui commence à l’initier au stade des recherches en cours sur la fission nucléaire.

    Enfin, l’embarquement survient, et la jeune Marian, devenue Alice dans sa nouvelle vie, saute en parachute, de nuit, dans le sud-ouest de la France, où elle est accueillie avec ses compagnons par un groupe de résistants. Commencent alors les premières actions de résistance dans la région, sous les ordres du chef de groupe, autoproclamé « le patron ».

    Ultérieurement, Alice reçoit l’ordre de se rendre à Paris. C’est là que le roman atteint sa plus forte intensité, dans la capitale occupée par les troupes allemandes, truffée de délateurs potentiels, dans laquelle la vie quotidienne est une épreuve entre restrictions alimentaires et insécurité.

    Marian y retrouve un ancien amour de jeunesse, Clément, lui aussi physicien atomiste, déjà marié, professeur au Collège de France, qui parfait l’information de Marian sur l’enjeu de l’atome.

    Marian erre dans la ville au fil des missions qui lui sont confiées, entrecoupant son séjour de brefs déplacements en province. A Paris, elle loge chez son ami Clément, dans le Quartier Latin, jusqu’à ce que son action aboutisse à un heurt avec les troupes d’occupation.

    D’une manière générale, ce roman brille par la précision de ses descriptions d’une époque des plus tragiques. Le lecteur ressent chez l’auteur une profonde empathie avec son héroïne et un fort attachement à la France, qu’il connaît particulièrement bien.

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  • Le titre de ce court roman, repris d’une superbe formule de Guy Debord, en exprime bien la tonalité, suite de promenades douces-amères dans Paris, des environs du Carrefour de l’Odéon à Auteuil et au boulevard de Clichy. Au Condé, un café situé près de l’Odéon, se retrouve régulièrement une petite bande d’habitués provenant d’horizons divers. Le narrateur remarque vite Louki, une jeune fille un peu étrange avec laquelle il se lie. Les soirées sont longues au Condé et chacun, petit à petit, livre un peu de sa vie à ses compagnons. La poésie et la littérature se mélangent aux études et aux affaires, et les liens se tissent et se distendent.

    Louki, adolescente, avait connu la solitude des longues soirées lorsque sa mère quittait l’appartement du boulevard de Clichy pour se rendre à son travail au Moulin Rouge. Un peu affolée, elle en profitait néanmoins pour sortir seule au milieu de la nuit, se promener dans le quartier et entrer dans un bar où elle nouait de fugaces connaissances, dans la crainte toujours présente d’être embarquée par la police, ou que sa mère apprenne ses brèves fugues nocturnes.

    Elle conserva l’habitude de ces errances, même après avoir débuté sa vie professionnelle et s’être mariée avec un collègue déjà installé. Sa jeunesse perdue ne s’est pas éteinte alors, et l’attirance de la fugue  l'a reprise bientôt. Le narrateur cherche à la retenir, mais Louki est imprévisible.

    Ce roman, admirablement écrit, exprime très bien la souffrance et la dérive de cette jeunesse perdue dans une ville où tout est organisé pour l’attirer vers des paradis imaginaire.

     

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  • Les 7 roses de Tôkyô est un long roman fleuve qui rend compte de la fin de la Seconde Guerre Mondiale au Japon, avec les bombardements des avions anglo-américains, qui ont détruit une large part des agglomérations japonaises et, en particulier, de Tôkyô, n’épargnant pas les quartiers d’habitation.

    Le narrateur, Shinsuke Yamanaka, est un artisan, fabricant d’éventails à Tôkyô. Il note tous les événements qui le marquent, au jour le jour, dans son journal, à la fin de la guerre et jusqu’en avril 1946.

    Il se trouve ainsi amené à décrire la souffrance du peuple japonais, qui a subi notamment l’explosion des deux bombes atomiques à Hiroshima et Nagasaki. Engagé en réaction à ce qui relève des crimes de guerre, il milite pour que les chefs militaires des USA soient poursuivis devant les tribunaux internationaux. Lui-même est personnellement touché dans sa famille par la perte d’une de ses filles.

    Au lendemain de la défaite de son pays, il est effaré de voir un bon nombre de ses compatriotes courtiser les vainqueurs, les soldats américains, dont le général Mac Arthur, qui a pris directement le commandement du gouvernement du Japon.

    Il est clair que la tonalité générale du roman tranche avec les quelques pages d’histoire rapidement lues au lycée dans nos années de formation, où l’accent était mis sur les pilotes kamikazes japonais.

    Quoi qu’il en soit, les positions tranchées de Shinsuke Yamanaka le conduisent à plusieurs reprises en prison, du fait de ses contestations radicales et de son hostilité affichée aux nouvelles règles édictées.

    La grande affaire qui le mobilise en particulier est l’attaque en règle des Américains contre la langue japonaise dans sa longue tradition.

    Ce roman touffu pourra rappeler aux lecteurs un peu familiarisés avec les littératures asiatiques le long roman de Lao She Quatre générations sous un même toit, qui relate l’occupation de la Chine, en particulier à Pékin, par l’armée japonaise deux ans avant le début de la Seconde Guerre Mondiale jusqu’à la fin de la guerre.

    Le contexte et le cadre sont évidemment différents, mais il peut être intéressant de faire le rapprochement entre ces deux œuvres monumentales, créées en réponse à un conflit au cours duquel les deux pays se sont affrontés.

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